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.Et elle avait fait plus que la calmer, puisqu’elle avait endormi la Mort.Les serfs n’avaient rien remarqué d’abord, mais c’était un fait, plus personne n’était mort sur ce fief depuis qu’Esclarmonde avait gagné sa tombe et, de tous ces miracles, celui-là leur paraissait le plus considérable.Oui, on ne mourait plus aux Murmures.Femmes en gésine, nouveau-nés ou vieillards, tous les gens du pays, et même les plus fragiles, semblaient épargnés par la Faucheuse depuis que la cloche de Sainte-Agnès avait sonné pour la première fois.Certains avançaient que la Mort trop curieuse s’était naïvement laissé empiéger à mes côtés dans ma cellette le jour de ma mise au tombeau.À la fin du mois d’août, le rosier planté par Lothaire sur le côté de ma fenestrelle m’a offert le parfum de sa toute première fleur, Douce a accouché à son tour d’un gros garçon que mon père a nommé Phébus, et Thierry II a décidé de la date du départ : le seigneur des Murmures nous quitterait une semaine après les relevailles de sa femme.J’espérais que mon père s’entretiendrait quelques instants avec moi avant de prendre la route.Jamais il n’était reparu devant ma fenestrelle depuis ce jour où il m’avait rendu Elzéar les mains percées.Il est venu la veille de son départ, chargé d’un lourd silence, et j’ai cru qu’aucun de nous ne parviendrait à briser ce silence-là.Mais mon père l’a rompu, comme on rompt du pain, il m’a parlé du soleil et j’ai senti qu’il me racontait sa mort à venir, qu’il m’offrait sa tête en un ultime hommage.« À son retour de croisade, m’a-t-il dit, mon père m’a raconté qu’en Orient le soleil tue plus de chevaliers encore que les flèches des infidèles.— Alors pensez à couvrir votre casque d’un voile de tissu pour ne pas cuire en dessous et préférez un haubergeon ou une tunique de cuir bouilli à votre longue cotte de mailles qui vous alourdirait trop.»Nous avons ainsi discuté de son paquetage, de la route qu’il prendrait pour rejoindre l’empereur, des chevaliers qui l’accompagneraient, de ceux qu’ils retrouveraient en chemin.« Amaury de Joux et Amey de Montfaucon viennent tous les deux, ils se détestent tant à cause de Berthe que le voyage promet d’être animé.Lothaire, lui, ne sera pas des nôtres.Il refuse de s’éloigner de celle à qui son cœur est attaché.Son père est persuadé qu’en le refusant tu l’as châtré.— Il me semble pourtant n’avoir tranché que mon oreille.— Je ne plaisante pas, Esclarmonde.Montfaucon n’ose pas le dire, mais, s’il en avait le pouvoir, il n’hésiterait pas à te faire brûler vive tant il te déteste.Il te dit sorcière et t’accuse d’avoir noué l’aiguillette de son fils.Méfie-toi de lui comme de la peste.Tu lui as volé son meilleur compagnon de chasse.Lothaire ne course plus ni les filles ni les cerfs.Il s’est entiché d’un ménestrel qui lui enseigne la vièle et il écrit des poèmes qu’il met en musique.— Et qu’il vient souvent me chanter.— Je le sais bien.L’archevêque aussi t’a rendu visite à plusieurs reprises.Sais-tu que ce diable d’homme est convaincu que c’est toi qui le fais se croiser ?— Il l’était.Nous en avons parlé et il convient maintenant qu’il a décidé seul de ce voyage, que je n’ai pas cherché à le lui imposer et que vous n’aviez aucun message à lui délivrer de ma part lorsque vous vous êtes rendu à Besançon.— Me tient-il rancune de ne pas l’avoir démenti ?— Non.Il est heureux de partir avec vous.— Je n’étais ni lâche ni menteur avant qu’il ne me nomme ainsi.Je ne le suis devenu qu’après, quand je n’ai rien trouvé à lui répondre.J’accompagne un vaniteux qui croit pouvoir plier les événements à sa convenance.Il n’est pas porté par la foi, mais par sa folie.Sais-tu qu’il passe son temps à imaginer des engins de guerre ? Pourquoi ne l’as-tu pas retenu ici ? Il est pour toi et Elzéar un puissant protecteur.Il craint que ses adversaires ne s’en prennent à vous en son absence, qu’on en vienne à te traiter d’hérétique.Il serait plus judicieux de le garder à portée de main.— Mon père, vous vous méprenez sur mes intentions.Je ne cherche à tromper personne.Si les hommes s’égarent, c’est malgré moi.Que Thierry II aille où bon lui semble ! Il est vrai que je n’ai pas eu le cœur de sacrifier mon fils à votre péché et que je n’ai rien dit vous concernant.Mon silence est une maigre armure, mais c’est la seule que j’ai pu emporter en ma tombe.Il suffirait d’une question pour déchirer ce léger voile et si cette flèche est tirée un jour, soyez certain que je ne mentirai pas.Le mensonge est trop lourd à porter pour qui choisit de vivre si près de la lumière divine [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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